Sénateur et président de l’agence d’attractivité de la Vienne, Jean-Pierre Raffarin s’inquiète de l’avenir de Poitiers et du département. Inquiet, mais pas résigné, il a plus d’un projet pour redorer le blason de son territoire : le Poitou.
Info-éco / Quel est votre regard sur la grande région ?
Jean-Pierre Raffarin / Le résultat est conforme à l’histoire politique de ce grand territoire, je suis convaincu qu’une victoire était possible pour nous en Poitou-Charentes, mais dans ce grand espace, c’était difficilement accessible. Virginie Calmels a montré ses talents, Olivier Chartier a fait un gros travail dans la Vienne, nous n’avons pas de déception. Sachant qu’Alain Rousset a eu en Aquitaine une politique qui a toujours été plus ouverte que la politique menée par Ségolène Royal ou Jean-François Macaire, nous voyons l’avenir de manière positive, très active. L’enjeu pour nous est d’éviter la fragilisation de la ville de Poitiers et du département. Je souhaite que dans cette grande région, l’identité du Poitou incarne le nord de la grande Aquitaine, en attendant son nom définitif à la fin du printemps prochain.
Info-éco / Appréhendez-vous l’avenir pour Poitiers ?
J.-P. R. / Nous avons déjà un problème avec l’attractivité de Bordeaux et le sentiment d’inquiétude qui règne à Poitiers. Très vite, il va falloir rebondir et se ressaisir pour que cette réforme ne fasse pas de la capitale de Poitou-Charentes la grande victime.
Info-éco / Comment éviter à Poitiers d’être une victime ?
J.-P. R. / En ayant des projets ambitieux, capables d’avoir le soutien de la grande région. Elle doit se dessiner un nouvel avenir, valoriser les idées nouvelles comme une université du numérique, la mise en valeur de la formation dans le tourisme, les métiers de la culture… Une nouvelle ambition poitevine doit être créée.
Info-éco / En tant que nouveau président de l’agence d’attractivité de la Vienne, ce rôle vous revient en partie ?
J.-P. R. / En tant que sénateur, je joue depuis quelques temps ce rôle d’ingénieur de projets pour la Vienne. Notre volonté est d’additionner le poids politique de chacun pour peser à Bordeaux. Aujourd’hui, il est important que l’on se rassemble car il y a dans cette grande région des opportunités, mais aussi des menaces. Par exemple, nous ne pouvons pas rester indifférents à l’avenir des CHU, celui de Poitiers à une excellente réputation en région et même au niveau national. Dans la nouvelle organisation, nous devons être vigilants, Poitiers doit se réveiller. Sur un autre plan, nous devons aussi faire attention à ce que le futur Grand Poitiers n’affaiblisse pas la ruralité lointaine en s’appropriant la ruralité voisine. Le danger d’un Poitiers trop élargi est de laisser à l’extérieur les territoires fragilisés. Je crains juste que cet objectif de 200 000 habitants, qui est un objectif comptable, crée une fracture en cercle à 30 km de Poitiers.
Info-éco / Comment va s’organiser cette agence ?
J.-P. R. / L’agence d’attractivité aura trois pôles, économique, touristique et international. Dans l’économie nous respecterons la loi NOTRe. Nous rechercherons des acteurs économiques et nous allons promouvoir notre territoire. Des assises de l’attractivité sont en préparation pour 2017. Son objectif sera d’associer les acteurs de l’économie. Nous allons les faire venir avec un client et un fournisseur afin de leur présenter les atouts du département sous différents angles. En matière d’international, nous devrions poursuivre l’aventure Futurallia et pour le tourisme nous avons l’équipe de l’agence touristique qui est déjà en place.
Info-éco / Quels sont vos projets pour développer l’attractivité ?
J.-P. R. / J’aimerai que ces assises de l’attractivité deviennent un rendez-vous régulier, voire une une structure qui anime ce réseau. Si possible, nous aimerions y associer les Deux-Sèvres pour porter la marque Poitou. Elle est très importante, dans la grande Aquitaine, l’identité du département va disparaître. La Vienne n’est pas une marque, le Poitou, l’est. Une agence d’attractivité du Poitou aura plus de poids dans la grande région et au-delà.
Info-éco / Vous aviez le projet de création d’un Club d’investisseurs de la Vienne, qu’en est-il ?
J.-P. R. / C’est un groupe qui existe. Deux fois par an, j’organise un déjeuner au Sénat et je réunis une trentaine de personnalités, des investisseurs, qui ont un lien avec le Poitou-Charentes. C’est ainsi que nous avons obtenu le Village flottant à Pressac. François Georges, président d’Agapace a une maison en Charente. L’évolution du monde moderne fait que ce n’est pas forcément le porteur de projet le financeur. L’idée est de développer et institutionnaliser ce rendez-vous, j’aimera passer à 50 personnalités, je ne les ai pas toutes identifiées, il y a des jeunes que je dois rencontrer.
Info-éco / L’institut Robuchon est sur les rails, êtes-vous confiant et quelles sont les étapes ?
J.-P. R. / Nos partenariats sont finalisés, tout est stabilisé, mais je suis toujours inquiet des crises qui pourraient menacer les financiers, comme l’évolution des taux d’intérêt, la crise en Chine. Les travaux devraient commencer au printemps pour une ouverture plutôt en 2018, certains aimeraient pour la rentrée de 2017, mais je suis prudent, je n’aime pas la précipitation. En terme de formation, nous avons déjà des perpectives de contrats avec des Japonais, des Chinois et des professionnels français qui nous assureraient un équilibre financier très vite.
Info-éco / Sur le plan national, quelle est votre opinion sur l’État d’urgence ?
J.-P. R. / La menace est réelle et de plus en plus forte, nous avons besoin d’un état d’urgence ; Faut-il le constitutionnaliser ? Je ne suis pas sûr ; l’état d’urgence doit rester exceptionnel et que les atteintes aux libertés soient provisoires.
Propos recueillis par R. Anglument et L. De Abreu