Les robes noires sont vent debout contre le projet de loi sur les professions réglementées proposée par le ministre de l’économie, Emmanuel Macron. Trois points mettent les avocats en colère.
Deux semaines de grève ont été votées par ceux de Poitiers. Le mouvement est reconduit jusqu’au 1er décembre. Premier point de désaccord : cette réforme donne la possibilité à un avocat d’être salarié d’une entreprise. « C’est contraire à l’essence même de notre profession. Il ne peut pas exister un lien de subordination pour un avocat, explique Françoise Artur, bâtonnière de Poitiers. Notre ADN, c’est l’indépendance. » Il existe aujourd’hui des avocats salariés, mais ils le sont d’un cabinet. « Cela implique qu’un avocat peut expliquer à son client que sa démarche est mauvaise. Le client qui vient demander conseil. Si l’avocat est salarié, il lui sera plus difficile de dire non. »
Second point noir : des non-avocats pourraient entrer au capital de cabinets. La profession s’inquiète de la création de « grande surface du droit » et la disparition des petits cabinets. « Si des banques ou des fonds de pensions investissent, la rentabilité primera ainsi que la proposition aux clients de prestation standardisée. Il existe aujourd’hui des cabinets spécialisés, mais à côté des petits cabinets demeurent et n’interviennent pas sur les mêmes affaires. Demain, avec cette disposition, un petit cabinet peut s’envoler. Pourtant, il propose du sur-mesure et une éthique. » Autre point mis en avant par la bâtonnière : « Vous n’aurez plus la certitude que l’avocat est libre et que sa parole l’est aussi. »
Autre désaccord : la territorialité. Dans certains contentieux, il y a obligation de prendre un avocat au tribunal. Avec ce projet de loi, pour un contentieux à Poitiers, pourrait être traité par un avocat de Marseille. « Le bâtonnier, le procureur et le président de tribunal travaillent ensemble pour améliorer la justice et la rendre plus humaine. L’expertise locale est primordiale. Tout cela disparaîtrait. C’est le vivre ensemble qui est en jeu. »
J.-P. G.